L’intérêt à agir est une condition essentielle à l’action en justice. Le défaut d’intérêt entraine l’interdiction de porter sa demande en justice. C’est l’article 31 du Code de procédure civile qui impose cette condition.
L’intérêt à agir s’apprécie au moment de l’introduction de la demande. En effet, l’existence du droit invoqué au fond n’est pas une condition de recevabilité de l’action mais de son succès.
Un intérêt à agir légitime
Ce qui est illégitime est souvent illicite ou immoral. Initialement, la jurisprudence considérait qu’en subordonnant l’action à un intérêt légitime, le législateur exigeait un intérêt juridiquement protégé.
Ainsi, elle a d’abord considéré que la concubine était irrecevable à demander des dommages et intérêt pour la perte de son concubin par un accident. Pourtant elle a accepté la demande de réparation du préjudice moral causé à son propriétaire par la mort d’un cheval de course.
C’est l’arrêt Dangereux, rendu par la Chambre mixte le 27 février 1970 qui a opéré un revirement de jurisprudence concernant la concubine. La Cour a accepté d’accorder réparation à celle qui, pour être à l’époque hors du droit, n’était pas pour autant hors la loi.
La concubine a donc un intérêt à agir, et celui ci est légitime. Mais elle doit toujours prouver le préjudice. Ce préjudice est caractérisé lorsque le concubinage est stable et le préjudice prouvé.
Depuis cet arrêt, l’intérêt légitime est plus généralement apprécié comme un intérêt sérieux. Cette solution a été consacrée par la Chambre mixte. Elle a estimé que peut agir « toute personne justifiant d’un intérêt à agir« . Exit donc le mot légitime malgré sa présence dans le texte du Code de procédure civile.
Un intérêt à agir né et actuel
L’exigence d’un intérêt né et actuel n’est pas prévu par les textes. Mais il s’agit d’une condition admise, puisque l’intérêt au succès ou au rejet d’une prétention s’apprécie au jour de l’introduction de la demande en justice. Cela signifie donc que l’intérêt doit exister au moment où la demande est formée. Un intérêt éventuel ne suffirait pas.
L’intérêt est né et actuel dès que la violation d’un droit est consommé. Toutefois, certaines actions préventives sont possibles. Ce sont des actions pour lesquelles l’intérêt à agir n’est donc pas né et actuel.
Les actions préventives admises
Ces actions sont au nombre de trois.
Il s’agit d’abord des actions déclaratoires. Ce sont les actions qui visent à obtenir du juge une déclaration d’un droit, ou l’existence ou la non existence d’une situation juridique, voire la légalité ou l’illégalité d’un acte. Le demandeur se trouve donc dans une situation assez instable. Ces actions ne supposent pas la réalisation du dommage. Mais il faut qu’à la date de la demande, il existe déjà un intérêt pour le demandeur.
Les actions préventives admises concernent également celles qui tendent à la sauvegarde d’une preuve. Il s’agit de demander au juge l’obtention de la constatation d’un fait. Ce fait, en cas de litige et donc dans un procès futur, peut permettre deux choses :
- Soit pour le demandeur de mieux en connaitre les contours ; cela lui permettra ainsi de savoir s’il peut utilement agir au fond ou non ;
- Soit d’étayer sa thèse s’il devait se retrouver en position de défendeur.
Ce doit est reconnu par l’article 145 du Code de procédure civile. Il s’agit des mesures d’instruction in futurum.
Enfin, la dernière action préventive concerne les actions tendant à écarter un trouble imminent. Il s’agit du référé sauvegarde prévu à l’article 835 alinéa 1er du Code de procédure civile. Ce référé a pour but de prévenir un dommage imminent et d’obtenir toute mesure de nature à contrarier la réalisation de ce dommage qui s’annonce.
Les actions préventives interdites
Il s’agit en premier lieu des actions interrogatoires. C’est l’action qui vise à contraindre une personne à se prononcer immédiatement sur une option qui lui appartient.
Sont également interdites les actions provocatoires. Ces actions sont en effet contraires au principe du caractère facultatif de l’action en justice. Elles étaient auparavant admises. Elles consistaient pour une victime à contraindre le responsable d’une atteinte à l’honneur ou à ses biens à saisir la justice afin qu’elle établisse le bien-fondé de ses allégations. A défaut de le faire, cette personne était réduite au silence, en ne pouvant plus saisir le juge par la suite.
Un intérêt direct et personnel
Le tribunal ne peut être saisi que par celui dont l’intérêt est lésé. Par exemple, un locataire n’a pas d’intérêt à agir pour faire valoir un droit qui n’appartient qu’au propriétaire de l’immeuble. Tel serait le cas si le jardin d’un locataire était occupé par un voisin. Seul le propriétaire peut agir en justice pour faire reconnaitre son droit de propriété.
Cette règle est représentée par l’adage « nul ne plaide par procureur« . Ce principe correspond à une prohibition de la représentation par un mandataire qui serait seul dans l’instance et qui ne dévoilerait pas le nom de son mandant.
La question de l’intérêt direct et personnel a été discuté en matière d’actions en justice exercées par ou contre un groupement. Il existe deux possibilités :
- Soit le groupement agit pour la défense d’un intérêt direct et personnel : c’est son propre intérêt qui est en jeu. Le groupement peut agir.
- Soit le groupement agit pour la défense des intérêts de la collectivité qu’il représente : il faut faire référence aux retombées des agissements contestés sur les intérêts collectifs des individuels que représente le groupement.
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